mercredi 1 décembre 2010

Les sectes en France aujourd’hui : un poison social

Les sectes en France aujourd’hui : un poison social

Date de mise en ligne : 25 juin 2006

Dans cette fin du XXè siècle, les sectes déchaînent les passions : à la une de bien des journaux, à la vitrine du libraire, à l’écran de la télévision, partout on parle d’elles et elles suscitent curiosité ou panique. Qui sont-elles ? Comment fonctionnent-elles ? Pourquoi défrayent-elles la chronique ? Comment éviter les pièges qu’elles tendent aux plus faibles de nos contemporains ? Pourquoi tant de nos concitoyens écoutent-ils leurs chants de sirène ?
Si ces questions assaillent autant nos esprits, c’est parce que le phénomène sectaire paraît omniprésent, touche tous les milieux, et semble répondre aux angoisses d’un monde déboussolé. Il serait bon de savoir d’abord ce qu’est exactement une secte, puis de comprendre comment elles attirent, et enfin d’expliquer pourquoi elles obtiennent ces succès, afin d’éviter de tomber dans leurs pièges et d’éclairer nos enfants ou amis.
Extrait du Permanences n°314.

Qu’est-ce qu’une secte ?

Le mot secte vient du latin "sequor", suivre. La secte suppose donc que l’adepte abandonne le monde où il vivait pour suivre un guide, un gourou, qui détient toute la vérité. Dans le langage religieux, le mot revêt un sens péjoratif : il désigne un petit groupe sécessionniste, opposé à l’Eglise, regroupant des disciples autour d’un maître hérétique. Dans le langage sociologique, il indique un groupe de volontaires qui partagent les mêmes croyances.
Quels sont en réalité les "caractères fondamentaux" d’une secte ? D’après le Père Trouslard, spécialiste des sectes, la secte s’appuie sur trois piliers :
-  D’abord, un maître divin : à l’origine de toute secte, on trouve l’initiative d’un individu qui, par libre décision, rompt avec son environnement et s’engage dans une voie propre. L’un des traits majeurs de la secte est donc la présence à sa tête d’un gourou, un chef tout-puissant, à l’autorité incontestable, qui fascine les adeptes.
En effet, ce guide exerce d’abord un pouvoir spirituel sur les fidèles qui le suivent. Tenant directement de Dieu, par une révélation privée, le "secret de la vraie vie", le gourou est plus qu’un leader charismatique, il est un véritable sauveur auquel on rend un culte. Tel un dieu, il reçoit des offrandes, soit symboliques comme des fleurs et de l’encens, soit beaucoup plus palpables comme des chèques ou des dons. Devant lui, il est nécessaire de se prosterner, on ne lui parle qu’avec un infini respect et on l’honore de titres empruntés soit au vocabulaire biblique, tel celui de "prophète et roi" réservé à David Berg, le fondateur des "Enfants de Dieu", ou celui de "nouveau messie" décerné à Moon, soit encore au vocabulaire des religions orientales, comme celui de "gracieuse divinité" reçu par Prabluycada, le gourou de Krishna.
Détenant seul la formule du salut, le gourou contrôle la diffusion du message seul ou aidé d’une oligarchie strictement triée. Pour faire partager sa foi, il exerce donc un pouvoir autocratique sur les adeptes : lui seul formule les règles, édicte les lois, distribue punitions et gratifications.
Aidé par une hiérarchie rigoureuse de chefs, jamais élus mais choisis par lui seul, il exige des disciples une obéissance aveugle, une soumission totale, "obéir, faire confiance, suivre", tel est le mot d’ordre de tous les gourous. David Berg, le père de la "Famille de l’amour", résume dans son livre "La révolution pour Jésus, comment faire ?" le rôle du chef : "Le chef n’a pas toujours raison, mais il demeure toujours le chef...", "même si le chef dit ou fait quelque chose dont tu penses que c’est faux ou non conforme à la Bible, il importe tout de même de ne pas murmurer puisque c’est Dieu qui l’a constitué chef...".
Cependant, la présence d’une personne rassembleuse ne suffit pas à définir une secte. La prudence est nécessaire pour éviter l’amalgame que les ennemis du catholicisme ne manquent pas de réaliser. A leurs yeux, Jésus qui attirait les foules, ou encore Saint Benoit, Saint Bernard et tous les saints fondateurs d’ordres monastiques seraient de simples gourous et l’Eglise est assimilée à une secte qui a réussi...
Il est urgent et capital de rappeler que la secte exige obéissance aveugle des adeptes, impose un strict et total contrôle de toute leur vie, manipule les esprits. Elle appartient donc à l’univers totalitaire, absolument étranger à l’esprit chrétien. Son message n’a rien de comparable, non plus, à l’esprit du christianisme.

-  La secte s’appuie aussi sur un deuxième pilier : elle offre une formule de salut, c’est-à-dire une doctrine, un message unique et universel. Le maître a reçu une révélation du ciel et communique à ses disciples ce savoir parfait qui lui a été accordé afin que règnent amour et épanouissement personnel dans le monde et que guérissent les blessures propres. "Il a découvert la vérité concernant l’Homme", proclament les adeptes de Ron Hubbard, le gourou de la scientologie ; "il annonce le chemin du salut total" affirment ceux de Moon.
Ce message, semblant répondre à toutes les aspirations des hommes de notre temps, séduit les angoissés ou les paumés de notre société, en leur proposant la construction d’un monde nouveau. Mais il est réducteur, car il livre une pensée unique et uniforme, celle du maître, empêche la réflexion personnelle et détruit les convictions profondes en imposant un langage aberrant et répétitif [1].
Conçu comme l’unique voie vers le salut, le message emprunte à toutes les religions, mais ne vise pas au syncrétisme. Au contraire, il endoctrine : la secte s’identifie à un absolu, nie toute transcendance et prend la place de Dieu. Entre le salut apporté au monde par le Fils de Dieu vivant et le salut proposé par les sectes, les différences sont colossales.
Tandis que, pour les chrétiens, la foi est une adhésion libre des personnes, l’Eglise une communauté vivante, corps mystique du Christ, chemin vers Lui, offrant au croyant les sacrements pour nourrir sa foi, une riche tradition pour alimenter sa recherche spirituelle et sa méditation et une ouverture sur l’au-delà et la transcendance pour maintenir son espérance.
Au contraire, pour les sectes, la foi est soumission d’esclaves, la communauté des adeptes un univers clos rempli d’interdits, la recherche personnelle un simple endoctrinement et le salut personnel disparaît dans une vague fusion cosmique. A l’Amour, à la communion, se substitue l’uniformité totalitaire. La secte coupe les liens verticaux et remplace le Christ sauveur. De même, elle coupe les liens horizontaux et prend la place de la société et de la famille.

-  La secte s’appuie sur un troisième pilier : elle constitue une "Famille de sauvés". Autour du gourou se constitue un groupe structuré, hiérarchisé avec des règles de vie strictes, une discipline de fer, où se vit une "nouvelle réalité". Ce groupe, à l’origine, fascine l’adepte par son comportement, son rayonnement, sa critique du monde extérieur égoïste, individualiste, matérialiste. Offrant une apparence de sécurité, de protection, de transparence, d’entraide, il apparaît comme une famille joyeuse, ouverte et solide dans un monde qui a détruit la cellule familiale, atomisé les individus et déraciné toute valeur. Aussi séduit-il les affamés de chaleur humaine, les assoiffés d’affection, les privés d’amour. Une fois dans le groupe, l’adepte rompt avec sa famille biologique, avec ses amis, avec la société, qui n’ont pas su le comprendre et répondre à son attente et retrouve une vraie famille. Désormais le gourou remplace les parents, et Moon n’hésite pas à signer ses lettres du sigle A.N.V.P., autrement dit : "au nom des vrais parents", tandis que David Berg nomme sa secte les "Enfants de Dieu" ou, aujourd’hui, la "Famille de l’Amour". Là résident paix, joie, ordre, chaleur et salut alors qu’à l’extérieur dominent haine, pleurs, chaos, crime et immoralité. Satan en un mot.
Ce manichéisme est un trait fondamental du phénomène sectaire et permet de maintenir l’emprise sur l’adepte : pour lui, quitter cette nouvelle famille devient synonyme de perdition. Il est donc nécessaire pour le maintenir de le couper du monde extérieur, mais aussi de faire disparaître chez lui tout esprit critique afin qu’apparaisse le fanatisme. Par une pression psychologique de tous les instants, la secte fonctionne sur le registre de l’affectif, de l’émotion et non de l’intelligence. Il est vrai que pour dissimuler les escroqueries morales, religieuses et financières qu’elle pratique, tuer l’esprit critique, capter la liberté devient vital pour elle.
Centrée autour d’un gourou maître tout-puissant des coeurs, des corps et des âmes, coupée du monde non pour mieux chercher Dieu comme le veut la tradition monastique chrétienne, mais pour mieux aliéner la personne, porteuse d’un message réducteur et non libérateur, la secte n’est ni une église, ni une communauté religieuse comme les autres, ni une religion. Elle est un néo-totalitarisme qui confond pouvoirs temporel et spirituel, un absolu qui prend la place de Dieu, une subversion de l’ordre religieux et social qui libère l’homme de ses liens naturels et surnaturels.
Cependant, si les sectes présentent toutes ces trois mêmes caractères, elles pullulent aujourd’hui ; aussi est-il bon de les connaître pour en mesurer le danger.

Les principaux groupes sectaires

D’après l’A.D.F.I. [2], on en dénombrerait 350 à 400, regroupant environ 500.000 membres. Différentes les unes des autres, tant par leur taille que par leur doctrine, elles peuvent être classées en cinq grands ensembles :

1 - D’abord, le plus ancien regroupe des sectes millénaristes, issues du protestantisme, de taille internationale. Adventistes, Mormons, Témoins de Jéhovah centrent leur enseignement sur la fin des temps [3]. Interprétant la Bible, prenant à la lettre l’Apocalypse, ils prévoient la fin de notre civilisation et insistent sur le paradis qui suivra. Groupes fervents et prosélytes, ils exaltent la vie familiale ancrée dans des communautés spirituelles qui prennent en charge tous les aspects de la vie matérielle. Aux hommes angoissés par le devenir du monde, ils apportent des réponses simples et des certitudes imprimées dans des publications à fort tirage [4] ; aux nostalgiques de justice, d’amour et de paix, ils offrent le mythe du paradis perdu à retrouver ; aux stressés du monde moderne, ils proposent une vie équilibrée et sans souci ; aux esprits avides d’absolu, ils expliquent le mystère de Dieu, tandis qu’ils permettent aux néophytes de prouver leur zèle en prêchant la bonne parole dans les rues.

2 - Puis, de loin le plus puissant et le plus dynamique, vient le groupe de sectes d’origine orientale. Groupes utopistes, elles tentent un véritable syncrétisme religieux pour attirer la jeunesse assoiffée de spiritualité, de merveilleux, mais rejettent les "dogmes desséchants".
-  "L’association internationale pour la conscience de Krishna" mêle au polythéisme issu de l’hindouisme une dose de monothéisme chrétien et une once de science, ainsi que quelques principes diététiques pour être mieux perçue de l’Occident.
-  "L’association pour l’union du christianisme mondial" (AUCM), fondée en 1954 en Corée par Moon, "sur ordre du ciel", prône en apparence l’union des Eglises chrétiennes afin de mieux lutter contre la subversion communiste. Mais, en réalité, mêle à un pseudo christianisme des croyances orientales relevées d’une pincée de science et assaisonnées d’une forte dose d’anti-communisme.
-  "L’église de scientologie", créée en 1950 en Californie par Lafayette Ronald Hubbard se baptise "église" pour se rattacher au contexte chrétien, mais se nourrit de concepts tirés de l’hindouisme, du bouddhisme, du gnosticisme, eux-mêmes greffés sur une base psychanalitique. Philosophie religieuse, à prétentions scientifiques, elle prétend guérir toutes les maladies en libérant, par l’hypnose, l’esprit de ses aberrations, et élabore une théorie nouvelle : la dianétique, ou science du mental, qui lui vaut une foison d’adeptes en ce monde malade.
-  "La Méditation transcendantale" est, elle, moins une religion qu’une méthode pour utiliser au maximum le potentiel du cerveau humain. Cela explique son succès auprès des hommes d’affaires soucieux d’augmenter leur productivité.
-  A ces sectes syncrétistes, s’ajoutent de-puis peu des groupes issus des pratiques orientales, Zen et Yoga, ainsi que des monastères bouddhistes, tibétains en particulier.
Présenté comme une simple technique de maîtrise de soi, le yoga a en réalité une visée d’ordre spirituel, et non physique. L’encyclopedia universalis (in ROC n° 1207) le définit comme "une technique de salut originale qui se propose de libérer l’âme de sa condition charnelle par l’exercice de disciplines psychiques et corporelles". Destiné à obtenir un détachement absolu, un arrêt total de la pensée afin de ne pas dissiper vers l’extérieur sa force vitale, le yoga n’est pas innocent. Il conduit à l’anéantissement de tout désir, au détachement du monde, à l’oubli de soi, non pour mieux atteindre le Dieu d’amour et pour mieux servir son prochain, mais pour que la personne se résorbe dans une fusion cosmique. Incompatible avec la pensée chrétienne, il est l’émanation du bouddhisme.
Le bouddhisme séduit particulièrement les Français en ce moment. Ses monastères s’installent dans nos vieilles terres de chrétienté : Bourgogne, Périgord, Dauphiné voient prospérer des centres spirituels situés aux antipodes de notre sensibilité religieuse catholique. Le bouddhisme, en effet, n’est pas une religion mais une voie de sagesse : il ignore la transcendance et la religion personnelle d’Amour entre le Dieu créateur et sa créature faite à son image et à sa ressemblance. Bouddha n’est qu’un homme, pas un dieu, un maître, pas un prophète, venu apprendre à ses disciples que le monde est illusion et le moi haïssable, que la sagesse consiste en l’anéantissement de tout désir, le dépassement de soi, et que le salut consiste en la fusion dans le cosmos.

3 - Ensuite il faut signaler le groupe le plus foisonnant des sectes gnostiques, occultistes et ésotériques. "Théosophie", "Fraternité blanche universelle", "Graal", "Rose-Croix"... pratiquent initiation, spiritisme, astrologie ou magie noire pour atteindre la "connaissance" et obtenir le salut. Friandes de symbolisme, utilisant les plus récentes découvertes médicales, elles cherchent à élaborer une doctrine qui, à partir de la science, rejoigne les grands thèmes métaphysiques et apporte une réponse scientifique aux angoisses. Ainsi, la "Gnose de Princeton" prétend atteindre la signification profonde du monde grâce à l’usage de la science.

4 - Beaucoup plus récent, le groupe de sectes se réclamant du catholicisme forme de petites églises liées à une personne dotée d’une vocation particulière d’exorciste, de guérisseur ou de voyant, mais totalement indépendantes du magistère romain ou de l’Eglise locale.
Si "La Sainte famille de Dorval", le "Christ de Montfavet" ne regroupent qu’une poignée de disciples, des mouvements comme I.V.I. ("Invitation à la Vie Intense") ou comme "Mandarom", piègent davantage les catholiques en jouant sur la confusion, le flou et l’inculture religieuse.
Fondée en 1983 par la guérisseuse Y. Trubert, I.V.I. est à l’origine un groupe de prières qui recrute dans le milieu catholique aisé. Mais, très vite, le groupe croît - mille adhérents aujourd’hui - et la doctrine évolue vers un syncrétisme d’hindouisme, d’ésotérisme et de relents de christianisme. Non seulement Dieu n’est qu’énergie cosmique, la Sainte Trinité se confond avec la triade égyptienne (Isis-Osiris-Horus), mais la guérisseuse devient une réincarnation de la Vierge, voire du Christ, tandis que les adeptes réincarnent, eux, les disciples de Jésus et échappent aux lois terrestres par la prière et les vibrations.
Ce fatras aberrant se retrouve dans la secte "Mandarom" créée dans les années 70 à Castellane, dans les Alpes de Haute-Provence, par Gilbert Bourdin. Vivant en ermite dans les forêts, il reçut alors une révélation qui l’amena à fonder un monastère destiné à accueillir les adeptes qui refusaient la perversion du monde et venaient se mettre sous la protection du Christ et du Bouddha, dont il serait la réincarnation. S’intitulant "messie cosmo-planétaire", initié à la kabbale, au soufisme, aux religions orientales, il propose une religion de synthèse à un millier de personnes qui vivent sous la triple protection des statues, du gourou et de la Vierge qui, munie d’une mitraillette, est chargée de lutter contre les forces du mal...
Beaucoup plus sérieuse et dangereuse apparaît l’organisation "Avenir de la Culture" : association culturelle, elle semble mener un combat digne et légitime en demandant aux catholiques et à la "majorité silencieuse" mais saine du pays, d’envoyer lettres et pétitions aux directeurs des chaînes de télévision, aux députés, voire au Président de la République, pour protester contre l’immoralité de certaines émissions.
Usant du langage de la morale, dénonçant l’emprise de la subversion, elle attire les milieux catholiques traditionnels et de larges couches de parents inquiets et irrités de l’incitation permanente à la débauche que constitue la télévision. En réalité, "Avenir de la Culture" n’est que l’émanation d’une secte, née au Brésil en 1960 : "Tradition-Famille-Propriété", qui cherchait à imprégner les milieux catholiques et qui s’est diffusée de par le monde en revêtant l’apparence de la morale et de la tradition.

5 - Enfin, à ces groupes de dimension planétaire, s’ajoutent aujourd’hui "la petite épicerie sectaire" [5]. Regroupant quelques dizaines d’adeptes, elles sont donc plus discrètes, plus efficaces car plus proches des disciples. Offrant un produit plus personnalisé, elles répondent mieux aux besoins du temps et offrent une meilleure alternative au milieu ambiant. Ainsi s’explique le succès des "sectes écologiques" prônant régime végétarien, voire végétalien, médecines douces et énergie cosmique. "Zen macrobiotique", "Ecoove" [6], la "Faculté de parapsychologie" de Marguerite Colombani, les "combattants pré-humains" de Christian Surger, l’"Ecole internationale de psychologie objectaliste" d’André Biry, la "psychologie et dentisterie" de Maud Person et du Dr Galiano... forment de petites communautés de marchands de rêve.
Coupées volontairement du milieu ambiant, ces sectes refusent technocratie, bureaucratie, idéologie mondialiste, pour se préoccuper de santé corporelle. Cependant, sous couvert d’hygiène physique, c’est à une véritable mise en condition psychique qu’elles procèdent ; sous couvert d’exotisme et de mystère, c’est à un déracinement culturel et à un lavage de cerveau qu’elles conduisent.
Pour terminer, il convient de préciser que le "Nouvel Age" [7] n’est pas une secte, mais une nébuleuse mystico-ésotérique omniprésente dans tous les domaines. Sa spiritualité syncrétiste, gnostique, panthéiste, inspire toutes les sectes. Religion sans dogme, elle a remplacé le Dieu fait homme des chrétiens par l’homme fait Dieu des sectes et autres mouvements anti-chrétiens. Symbole de la nouvelle religiosité qui rejette les dogmes mais suit aveuglément des maîtres à penser, pourvu qu’ils soient "authentiques", originaux et chaleureux, le "New-Age" constitue le terreau sur lequel prennent racine les sectes.
Mais pourquoi ces sectes, si aberrantes parfois, attirent-elles ? Et comment font-elles ?

Pourquoi les sectes attirent-elles nos contemporains ?

Après avoir constaté le caractère totalitaire des sectes, le fatras idéologique qu’elles proposent, il devient nécessaire d’expliquer l’attrait de ces mouvements.
D’abord, il convient de remarquer que le phénomène sectaire n’est pas une nouveauté dans l’histoire. Dans le passé, chaque fois que dépérissait la morale et que la religion cessait d’être l’ossature de la civilisation, des groupes mystiques, en quête d’un ailleurs merveilleux, occupaient le terrain abandonné pour répondre à l’angoisse existentielle de leurs contemporains. Cependant, n’attirant que quelques illuminés, ils dépérissaient dès que la partie saine de la société reniflait le danger, réagissait et arrêtait l’assaut des sectes.
Malheureusement de nos jours, depuis une vingtaine d’années, les sectes prolifèrent dans les nations occidentales de tradition chrétienne et leurs adeptes ne sont pas des marginaux mais des jeunes gens issus, pour la plupart, des classes moyennes catholiques. Il semble donc que le terrain soit particulièrement réceptif et que les sectes s’engouffrent aujourd’hui largement dans le vide laissé, dans notre société, par la “crise de l’espérance et des idéologies” [8]. Elles profitent donc de la crise de civilisation et de l’Eglise que nous traversons.

1 - Les sectes attirent dans un contexte de crise de civilisation : elles apportent une réponse aux angoisses de notre temps.
-  D’abord la secte veut remédier aux insuffisances de notre civilisation industrielle matérialiste : elle répond aux angoisses religieuses de l’homme. En rupture avec la civilisation chrétienne qui concevait l’homme comme une créature faite à l’image et à la ressemblance de Dieu, le travail comme la poursuite de l’oeuvre du Créateur, le bonheur comme le salut personnel dans l’autre monde et qui tournait ses regards vers le ciel et vers l’avenir, la civilisation technique du XX° siècle ne s’intéresse qu’à la production de biens matériels, à la sécurité assurée à chacun et au quotidien. Ne voyant dans l’homme qu’un producteur, dans le travail qu’une marchandise, dans le bonheur que possession à satiété de biens de consommation, elle ne vise que la réussite individuelle et ne satisfait plus la soif d’idéal, de communion et les besoins spirituels de l’homme, animal religieux qui ne vit pas seulement de pain.
C’est ce manque que les nouvelles religions vont combler : aux hommes qui se posent les questions fondamentales de l’humanité : "qui suis-je ?", "où vais-je ?", "quel est le sens de ma vie ?", elles apportent des réponses toutes faites qu’ils acceptent, d’une part parce qu’elles satisfont leur curiosité, d’autre part parce que, habitués à être assistés et à l’immédiateté, ils n’ont pas à effectuer de recherches personnelles, longues et fastidieuses. Elles apportent des repères aux jeunes déboussolés.
-  Ensuite, la secte veut combler les manques de notre société en crise d’identité : elle apporte communion et fraternité aux isolés. La civilisation technique a disloqué la société traditionnelle, déraciné les hommes en les attirant vers les mégapoles sans âme, atomisé les individus, tandis que le branle-bas culturel de l’après 68 détruisait le monde ancien, libérait les moeurs et dissolvait les familles. Sans repères moraux, sans autorité parentale, sans chaleur humaine, les jeunes ne savaient que faire de leur liberté dans un monde froid et technicien. La secte leur fournit un groupe chaleureux, antidote à l’anonymat ambiant, l’autorité d’un gourou contre-poison du laxisme parental, une communauté de vie remède à l’isolement urbain.
-  Enfin, la secte veut guérir les blessures des hommes modernes. Elle apporte une occupation aux chômeurs blessés dans leur dignité de travailleurs. Elle promet un équilibre aux écologistes indignés du pillage de la nature par le monde industriel. Elle offre des perspectives pour l’après-vie aux angoissés de l’avenir. Elle guérit les malades. En un mot, la secte remplace Jésus-Christ et son Eglise. Pourquoi les Eglises, et l’Eglise catholique en particulier, se sont-elles laissé confisquer cette place ?

2 - Les sectes ont largement profité de la crise religieuse pour s’implanter.
-  Durant les décennies 60 et 70, l’Eglise catholique fut en plein désarroi. Malgré son aggiornamento conciliaire, elle a eu beaucoup de mal à faire passer son message auprès des contestataires qui se détachaient d’elle. Aussi certains de ses prêtres crurent-ils bon de le taire ou de le minimiser. Oublieux du trésor dont ils avaient la garde, ils ne l’ont pas transmis, ou mal, aux jeunes générations ; négligeant la transcendance, ils ont vécu dans le monde et ont proposé de nourrir les corps au lieu de soigner les âmes ; devenus des fonctionnaires de l’appareil ecclésial, ils ont perdu le sens du sacré et n’ont pas répondu à la soif d’absolu des hommes déboussolés par la chute des idoles "progrès continu" et "communisme". L’Eglise semblant n’avoir plus rien à dire au monde, le monde s’est détourné d’elle.
-  Un certain nombre de catholiques, blessés par le monde, mal informés, incultes sur le plan religieux, cherchant la lumière, ont cru trouver dans les sectes les réponses que l’Eglise ne leur fournissait plus. Or, ces sectes ont su profiter, d’une part du retour du religieux né de la peur de l’avenir et de l’inquiétude sur l’au-delà, d’autre part de la désaffection, voire même de l’allergie des jeunes, à l’égard de tout dogme, tout culte, et de toute hiérarchie religieuse pour offrir un ersatz de religion répondant à cette soif d’absolu.
-  Les sectes ont comblé le vide religieux en récupérant et subvertissant le message chrétien. Puisque l’Eglise ne parlait plus de satan, la secte, elle, le faisait, pour expliquer le mal ; puisqu’elle taisait les mystères, la secte les évoquait et proposait même un salut par la connaissance, l’acquisition d’un savoir initiatique. Peu à peu l’irrationnel remplaçait le mystère, la réincarnation [9] prenait la place de la Résurrection, le gourou se croyait un nouveau messie, l’âge d’or à venir serait le nouveau Paradis et la prière personnelle devenait répétition de slogans. Sous couvert de nouvelle religion, c’est en réalité à une forme de religion archaïque que fait penser la secte. Incompatible avec la foi catholique, boutique où chacun prend ce qu’il veut, elle constitue un véritable "réveil du paganisme", selon l’expression du Cardinal Poupard.
Nées à la jonction d’une crise religieuse et d’une crise de civilisation, les sectes s’épanouissent sur le terreau du branle-bas culturel, de la perte de l’Absolu et de l’acculturation. Elles révèlent la soif d’idéal et de spirituel, l’affaiblissement des religions institutionnelles et le jaillissement de religions "sauvages".
Pour l’Eglise catholique, elles constituent un "défi pastoral" qu’il est urgent de relever pour éclairer le jugement de nos contemporains et combler leurs besoins spirituels en réalisant une réelle évangélisation de ces nouveaux païens. C’est le message libérateur de Jésus-Christ qui seul libèrera les hommes prisonniers d’une civilisation sans âme et sans idéal et non le décervelage [10] sectaire. Car, si la secte semble combler les attentes spirituelles des laissés pour compte de la civilisation matérialiste, des assoiffés d’absolu, comment les attire-t-elle dans ses rets ? Quels sont ses buts réels ?

Comment les sectes attirent-elles ? Dans quel but ?

D’après le Père Trouslard, la secte capte les esprits en trois temps successifs :

1 - En premier lieu, elle agit par "séduction" auprès des jeunes accessibles aux sollicitations religieuses et qui se posent des questions sur le sens de leur vie. Le recrutement déjà est fort habile, il utilise les méthodes Mmodernes du marketing : d’abord il s’agit de repérer une cible, victime fragilisée par la solitude, le chômage, une déception sentimentale ou idéaliste et naïve dans un monde de félons.
Ensuite, il s’agit de racoler cette victime : dans un lieu public, rue, école, bistrot, discothèque... un missionnaire du même âge, bien préparé, sachant vendre sa marchandise, interpelle la personne ciblée et amorce la discussion. Celle-ci ne porte aucunement sur la mission [11], mais sur les problèmes fondamentaux du sens de la vie, de son utilité, de la valeur de l’amour, de l’amitié, de l’existence de Dieu ; en bref, de toutes les questions qu’un jeune peut se poser sans que sa famille, la société ou même l’Eglise ne lui apportent de réponse.
Se sentant écoutée, comprise, la victime se sent heureuse et, à son tour, écoute attentivement les arguments de son interlocuteur qui, lui, se comporte en publicitaire. S’il ne demande rien, en revanche il se montre sincère, chaleureux, affirmatif, pour manipuler l’esprit de sa proie et lui proposer, de façon tout à fait naturelle, de rompre sa solitude, de trouver bonheur et chaleur humaine en l’accompagnant chez des amis. C’est donc en toute liberté, de sa propre initiative, sans avoir nullement le sentiment d’être embrigadé, mais sans savoir où elle va, qu’enfin la victime est conduite vers un "centre" [12]. Là prend fin la phase de séduction.
Accueilli chaleureusement, l’invité trouve là tout ce qui lui manque : amitié, chaleur humaine, personnes à l’aise, bien dans leur peau, sachant répondre aux questions clés, une atmosphère entraînante de chants, de prières, de parfums. Trouvant sa vie antérieure fade, il accepte avec enthousiasme un stage d’un week-end ou plus dans ce centre, au bout duquel il décide généralement de rompre avec sa famille et la société pour se consacrer au groupe qui va devenir son nouveau foyer. Il y accepte une place inférieure, offre tout ce qu’il possède : son temps, ses forces, sa fortune, du moment que ses nouveaux amis lui offrent, eux, le salut.
L’entrée dans la secte est donc ressentie comme une libération, une aventure personnelle, en même temps qu’une assurance contre les aléas de la vie puisque, désormais, le groupe le prend entièrement à sa charge.

2 - Alors commence la deuxième phase de la captation, celle de la "destruction". Pour fidéliser le nouvel arrivant, le groupe l’incite d’abord à rompre avec tout son environnement antérieur : famille, amis, travail sont montrés comme un monde hostile, chargé de négatif, règne des forces du mal dont il faut s’éloigner et se purifier. "Famille, parents, amis forment une trinité avec Satan", prétend Moon. D’ailleurs, dans ce monde perverti, l’adepte n’était lui-même que nullité, comme le prouvent les tests que réalise par exemple l’église de scientologie ; mais heureusement, grâce à l’aide de cours, à l’usage de méthodes nouvelles, à l’amitié du groupe et à la tendresse du gourou pour cette âme en perdition, le nouveau pourra devenir quelqu’un.
A condition bien sûr qu’il accepte d’oublier son passé et de subordonner sa pensée et son jugement déformés à ceux du gourou et du groupe qui, eux seuls, détiennent la vérité. Il faut donc rompre avec ses racines culturelles, comme on a rompu avec ses racines humaines, pour accéder au salut. Pour faire perdre toute identité à l’individu et lui donner une personnalité d’emprunt, la secte utilise alors un langage nouveau, une langue de bois où les mots sont détournés de leur sens habituel afin de faire perdre toute emprise sur la réalité.
Ce nominalisme n’est pas sans analogie avec les dictatures totalitaires [13] et s’apparente à un kidnapping spirituel. Dès lors que la destruction sociale et mentale semble réalisée, que l’adepte est devenu disponible aux idées nouvelles qu’on veut lui inculquer, peut débuter la troisième phase.

3 - La phase de reconstruction consiste à endoctriner, à l’aide de procédés psychiques ou psychologiques, le novice. Déjà, pour manipuler son esprit, le maître affaiblit sa volonté : des procédés somatiques tels que privations de sommeil, carences alimentaires, sévices divers, usage de drogues [14], créent un état second, affaiblissent le disciple et le mettent dans un état de dépendance totale. En même temps, des méthodes psychosomatiques détruisent son intelligence et diminuent peu à peu son esprit critique.
Coupé du reste du monde, le novice n’est, en effet, jamais seul mais toujours entouré, soumis à la pression du groupe qui programme son emploi du temps. Faute de temps à lui, sans cesse occupé, le nouvel adepte n’a pas la possibilité de faire retour sur lui et de réfléchir. La seule nourriture qui soit offerte à sa réflexion est la méditation des oeuvres du gourou, le reste n’étant que diablerie. Or cette littérature use d’un langage simpliste qui ne s’adresse pas à la raison mais à l’affectif. Ainsi infantilisé dans son langage, l’adepte va aussi l’être dans son comportement. Comme un enfant, il n’assume aucune responsabilité, ne prend aucune initiative mais se contente, sous peine de sanctions très dures parfois, d’obéir et d’exécuter des ordres ; comme un bébé, il répète sans cesse les mots qu’on lui apprend : les incantations répétitives [15] modifient peu à peu sa façon d’être et créent, chez un être affaibli, des réflexes pavloviens. Comme un enfant il a besoin d’être sécurisé et on lui apprend à lutter contre les forces du mal : celles qui sont en lui et qu’il avoue lors de confessions publiques dégradantes, ou que d’autres dénoncent dans de véritables séances de délation ; ou bien les forces nocives extérieures au groupe qu’il faut apprendre à combattre les armes à la main.
Vivant dans la terreur, privé de volonté, de réflexion, de jugement, l’adepte n’a plus aucune liberté et devient totalement transparent pour le gourou qui règle entièrement sa vie matérielle, spirituelle, sentimentale et même sexuelle. Car le sexe aussi devient l’affaire du maître qui contrôle sa consommation, impose parfois ses perversions ou exige l’abstinence [16].
Dépouillé de son identité, le disciple ne peut que se soumettre ou se suicider. Embrigadé, il est soumis à un véritable vide de sa conscience, à une captation mentale, à une manipulation et un lavage de cerveau permanent.
En réalité, ces méthodes s’apparentent, comme le note B. Filliaire [17], à celles en usage dans les pays totalitaires, "les sectes, comme les régimes nazis ou staliniens, ont pour méthode de déshumaniser tous ceux qui rentrent chez elles, de les forcer à couper les ponts, de ne plus avoir aucune autonomie dans le comportement et dans la pensée".
Mais pourquoi usent-elles de ces méthodes, quel est le but profond des sectes ?
Derrière le masque religieux, scientifique ou écologique, se cachent en réalité des organisations à but lucratif ou politique dont les activités lèsent les personnes et menacent la société tout entière. Les sectes répondent, en fait, à la triple tentation faite au Christ par Satan.
Tentation de l’argent : les sectes sont de vraies machines à sous. Pour mieux se dépouiller et atteindre le salut, le disciple vide son compte en banque, vend ses biens, verse son salaire au gourou bien-aimé qui, non seulement augmente ainsi son emprise sur un adepte dépouillé, mais devient richissime. Ainsi Moon a-t-il réalisé un véritable empire industriel qui couvre le monde : agro-alimentaire, pêche, mécanique et métallurgie, électronique, banque, communication, rares sont les secteurs qui lui échappent. Coréenne à l’origine, sa fortune est multinationale [18] aujourd’hui et il envisage d’énormes investissements dans le Tiers-monde ou même en Chine et en Russie, où il a été reçu avec les honneurs d’un chef d’Etat. De même, l’église de scientologie multiplie, pour ses disciples, les cours, et un bon adepte débourse environ 150 000 frs par an [19]. Enfin d’autres, comme Krishna, pratiquent le trafic lucratif de la drogue, ou celui de la prostitution comme "les Enfants de Dieu" pour s’enrichir.
Conçues comme des entreprises lucratives, multinationales, les sectes sont loin de l’esprit des Béatitudes, mais se rapprochent de l’idée protestante que la richesse matérielle est la récompense de Dieu offerte aux élus ici-bas. Cette richesse leur permet d’approcher et de corrompre le pouvoir politique.
La tentation politique ne touche pas toutes les sectes. Si les sectes millénaristes, comme les Témoins de Jéhovah, s’en désintéressent, si les sectes orientales, comme Krishna, préfèrent préparer un monde nouveau, d’autres ont des ambitions politiques. Les mormons, les premiers, ont créé, dans l’Utah, une cité idéale selon leurs principes. Moon, quant à lui, se conduit comme un chef de parti. Anti-communiste, il n’a jamais caché son désir d’unifier les deux Corées et a toujours soutenu de son argent les partis politiques anti-communistes, l’expansion de sa secte répondant à sa volonté d’impliquer le monde entier dans cette lutte politique.
Cette collusion politico-religieuse est contraire à l’esprit chrétien qui distingue les deux pouvoirs mais répond à la volonté de puissance des gourous.
L’ambition personnelle et la volonté de puissance caractérisent tous ces prétendus maîtres. Exerçant un pouvoir absolu dans leur secte dont ils tirent des avantages matériels substantiels, ils exigent aussi d’être traités comme des dieux. Ecoutant le serpent de la Genèse "vous serez comme des dieux", ils acceptent prières, encens, hommages et titres divins, "nouveau messie, 3ème Adam", tel est tout simplement la nomenclature de Moon.
Pouvoir financier, politique et personnel au service d’un gourou sans scrupule, telles apparaissent donc les sectes en vérité. Attirant les jeunes par des promesses fallacieuses, elles sont une entreprise totalitaire, obscurantiste, une "régression vers les cavernes", selon l’expression de Roger Ikor [20].


Que faire face au défi mortel pour la foi, la société et la personne humaine que représente l’existence actuelle de ces sectes ?
-  Sur le plan judiciaire, en France, elles semblent invulnérables car, se présentant comme des organisations religieuses, leurs activités ne sont pas de la compétence des tribunaux. En effet, la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat interdit aux magistrats français de se prononcer sur la validité d’une doctrine religieuse et ceux-ci, attachés à la liberté de conscience, hésitent à prononcer des condamnations. Cependant, des nouveautés apparaissent dans la justice française : s’il n’existe toujours pas de législation anti-secte, les juges, sensibles aux atteintes psychiques et aux manipulations mentales des adeptes, invoquent moins la liberté de conscience et considèrent davantage la secte comme un fléau social. A cet égard, le jugement rendu le 7 septembre 1993 au tribunal de grande instance de Bergerac est symptomatique et exemplaire. Jugeant A. Biry, fondateur en fuite de la "psychanalyse affectialiste", les magistrats l’ont condamné à 5 ans de prison ferme et 500 000 frs d’amende, sans compter qu’ils l’obligent à rembourser 4,5 millions de francs "à titre de préjudices subis par les parties civiles" [21]. Par sa sévérité et sa reconnaissance du phénomène sectaire, ce jugement redonne espoir à bien des familles. Peut-être fera-t-il jurisprudence ? Peut-être aussi les rapports envoyés au Parlement européen par le député Cottrell et au Parlement français par A. Vivien aboutiront-ils à mettre en place une réglementation qui préserve l’individu et la société contre les escroqueries religieuses.
-  Sur le plan religieux, il revient à l’Eglise de ne pas oublier les promesses de son Baptême. Non seulement elle doit prendre au sérieux le phénomène sectaire totalitaire, mais elle doit avoir le souci d’évangéliser les personnes, le devoir d’insister sur la Révélation, le salut personnel, la personne de Jésus-Christ et sur la Vérité qui seule libèrera l’homme prisonnier de cette nouvelle religiosité dont les sectes ne sont que la partie émergée.
[1] A noter que les bibliothèques de sectes n’offrent, d’après les membres qui les ont quittées, que des livres du gourou. Les formules livrées à la méditation sont d’une pauvreté insondable : ce sont les "mantra" de la méditation transcendantale, les "principes divins" de Moon, la "vie selon la conscience de Krishna" chez Krishna, le "training" chez la scientologie..
[2] Association de Défense des Familles et de l’Individu - 10 rue du Père Julien Dhuit, 75020 Paris. Il existe aussi une autre association : C.C.M.M. (le Centre de Documentation Contre les Manipulations Mentales, 19 rue Turgot, 75009 Paris) fondée par l’écrivain Roger Ikor après la mort de son plus jeune fils, victime d’une secte.
[3] Originaires des USA, ces sectes millénaristes conçoivent Dieu comme un justicier. Déformation du christianisme, elles nient la Trinité. Le Dieu d’Amour donnant son fils pour sauver le monde n’est, pour elle, que pure invention. Pour justifier leurs affirmations, elles multiplient les citations bibliques, tirées de leur contexte. On compte 22.000 Mormons en France.
[4] Les "Témoins de Jéhovah", secte fondée en 1880 aux USA par Ch. T. Russel, ancien presbytérien, forment une société hiérarchisée, en forte croissance : 115 .000 en 1942, 4 millions aujourd’hui dont 112.000 en France. Editent deux bimensuels : "Réveillez-vous" et "La tour de garde", au tirage de 14 millions d’exemplaires. Ces revues règlent toutes les questions religieuses.
[5] Expression tirée du livre de T. Cottin et P. Martin "Dans le secret des sectes", Flammarion - 1992.
[6] Fondée par Pierre-Louis Maltais, alias Piel Peljo Maltest, prétendu réincarnation d’un chaman de l’ère glaciaire, regroupait sur les bords de la Marne une quarantaine d’adeptes, vivant comme les indiens et ne mangeant que de l’herbe...
[7] Cf "Permanences" 279.
[8] Expression de A. Vivien, auteur d’un rapport sur les sectes.
[9] 22 % des Français affirment croire en la réincarnation.
[10] D’après le titre du livre de B. Filliaire : "Le grand décervelage", Editions Plon.
[11] Sauf pour Krishna, puisque la tenue vestimentaire les caractérise.
[12] Moon-Krishna... pratiquent cette conversion foudroyante, tandis que la scientologie ou la méditation transcendantale préfèrent la lente infiltration par le yoga.
[13] Cf "1984" de G. Orwell.
[14] Chez Moon, par exemple, on ne dort qu’une nuit sur deux, on ingurgite des infusions de ginseng, thé spécial qui, en fait, est une drogue. Ailleurs on n’autorise le disciple à uriner qu’une fois par jour, ce qui augmente le taux d’urée dans le sang et provoque une sorte d’anesthésie.
[15] Chez Krishna, le disciple psalmodie 1328 fois par jour les mêmes phrases. A la méditation transcendantale, ce sont des "mantra" (1 ou 2 syllabes) que l’on rabâche.
[16] Moon, par exemple, impose des mariages collectifs où il choisit les partenaires, puis exige trois ans de séparation pour le nouveau couple. C’est le contrôle par l’abstinence. Les "Enfants de Dieu", au contraire, se prostituent au nom du gourou.
[17] Cité plus haut.
[18] Elle serait de l’ordre de plus de 15 milliards de dollars.
[19] Le trésor de la secte s’élèverait autour de 500 millions de dollars.
[20] Lire "La tête du poison" de Roger Ikor - A lire aussi A. Woodrow : "Les nouvelles sectes" - Point Histoire - Seuil 1981.
[21] Cinq anciens adeptes.


http://www.ichtus.fr/article.php3?id_article=174

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